« Seigneur, me serais-je tant trompé ? Montre-le-moi ! » Telle est la prière que j’ai fait monter vers Dieu en refermant le livre de R.C SPROUL, Choisis par Dieu. J’avouerai que sa lecture m’avait plutôt ébranlé. Article 1 sur 6
J’avais pourtant lu de nombreux ouvrages de théologiens, qui, à la suite de Saint-Augustin et de Jean Calvin, professent la même doctrine déterministe réformée. Aucun ne m’avait tant troublé. J’ai donc repris le livre une 2e fois, l’esprit ouvert, et je vous emmène dans mes réactions et mes interrogations au travers de 6 articles…
Pourquoi lire ces articles, alors que tant d’autres traitent déjà ces thématiques ?
1. Parce que ce livre « Choisis par Dieu » est représentatif de ce qui est actuellement enseigné dans presque toutes nos facultés de théologie et nos instituts bibliques.
J’ai écouté et lu des cours de profs estimés, j’ai correspondu avec certains.
(Si le contact a toujours été fraternel, aucun ne m’a jamais signalé la moindre erreur dans les textes publiés comme je l’aurais souhaité, prêt à me corriger.)
2. Parce que son auteur, R.C. SPROUL, est très apprécié parmi les théologiens évangéliques calvinistes, pour qui il est une référence qu’ils citent beaucoup.
Petite présentation de l’auteur : Robert Charles Sproul, (1939 – 2017) était un théologien et pasteur presbytérien réformé calviniste américain. Il était de conviction pédobaptiste, comme un nombre étonnant de ces théologiens, dont nous apprécions par ailleurs les écrits. Mais au fond, ce n’est pas si étonnant. (voir Pédobaptisme et sotériologie )
Dès lors, vous comprendrez facilement que mon souci n’est pas polémique, mais pastoral : ai-je tort de craindre que le monde évangélique risque d’être conquis petit à petit par la théologie réformée ?
Celle-ci est pourtant si différente :
– En tant qu’ É v a n g é l i q u e s, nous croyons que Dieu fait naître de nouveau ceux qui se repentent et mettent leur confiance en Christ crucifié pour eux, n’est-ce pas ?
– La doctrine r é f o r m é e, défendue par R.C. Sproul, stipule l’inverse, c’est-à-dire que, sans égard pour leur attitude de cœur, Dieu ferait souverainement naître de nouveau ses élus, afin qu’ils puissent se repentir et croire !
Mais n’anticipons pas, cela sera montré et examiné dans un autre article.
Rassurez-vous donc, il n’est pas question ici de démolir la thèse de « l’adversaire », au demeurant frère en Christ, mais d’introduire une honnête quête de vérité, à laquelle j’aimerais associer les lecteurs. Vous êtes invités à me compléter ou corriger !
Ces articles évolueront au fur et à mesure des nouveaux éclairages reçus.
Je n’ai pas honte de vous livrer aussi des interrogations pour lesquelles je n’ai pas de réponse.
Je mettrai les extraits du livre en retrait et mes réactions ou celles d’autres sans retrait. La première citation de RC Sproul (ci-dessous) me remplit de joie :
Un état d’esprit humble et ouvert
Lorsque j’enseigne la doctrine de la prédestination, ceux qui s’entêtent à refuser de s’y soumettre me contrarient souvent.
J’ai envie de leur crier : « Ne vous rendez-vous pas compte que vous résistez à la Parole de Dieu ? » Dans ces cas-là, je me rends coupable d’au moins un de deux péchés.
– Si ma compréhension de la prédestination est juste, je me montre au mieux impatient envers les gens qui vivent simplement le même combat intérieur que je vivais auparavant ou au pire arrogant et condescendant envers ceux qui sont en désaccord avec moi.
– Si ma compréhension de la prédestination est fausse, alors mon péché est double, puisque je calomnie ainsi les saints qui, en s’opposant à ma conception des choses, combattent au côté des anges. Relativement à cette question, les enjeux sont donc de taille pour moi.
>> Voilà un bel esprit d’accueil évangélique, qui contrebalance fort heureusement d’autres affirmations du livre, bien moins consensuelles ! L’auteur se dit conscient que dans l’histoire de l’Église, il y a toujours eu désaccord sur cette question de prédestination. Il constate que « ce débat n’a pas lieu entre libéraux et conservateurs ou entre croyants et non-croyants.
Il a cours entre chrétiens pieux et fervents. » p 16 Très juste !
Ce premier article sera consacré au sujet de la prédestination :
Prédestination, élection
Après cette belle introduction, pour montrer combien la doctrine de la prédestination réformée est biblique, l’auteur cite les versets suivants :
En lui, Dieu nous a élus avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints et sans reproches devant lui ; il nous a prédestinés dans son amour à être ses enfants d’adoption par Jésus-Christ, selon le bon plaisir de sa volonté.
(Éphésiens 1.4,5). En lui nous sommes aussi devenus héritiers, ayant été prédestinés suivant le plan de celui qui opère toutes choses d’après le conseil de sa volonté (Éphésiens 1.11).
Car ceux qu’il a connus d’avance, il les a aussi prédestinés à être semblables à l’image de son Fils, afin que son Fils soit le premier-né de beaucoup de frères (Romains 8.29).
>> Effectivement, voici les seuls versets de la Parole qui parlent de prédestination, et n’indiquent-ils pas tous clairement qui est prédestiné (les chrétiens et non les perdus), et à quoi ils sont prédestinés (à ressembler à Christ et non à être sauvés !) ?
La prédestination parle du dessein de Dieu pour ceux qui sont déjà connus de lui, à savoir que, par l’appel, la justification et la glorification, ils soient rendus pleinement conformes à l’image de son Fils. Il ne s’agit pas d’être prédestiné à figurer parmi les élus (à être chrétien) mais d’un dessein prédestiné de Dieu pour les élus. Un dessein dans lequel Dieu œuvre dans les circonstances de vie des élus. (Robert E PICIRILLI, Source )
Bien-sûr, il y a d’autres mots, notamment les élus. C’est d’élection des pécheurs qu’il conviendrait de parler et non de prédestination.
Voir à ce sujet les articles suggérés à la fin de celui-ci.
Nous trouvons aussi l’élection de notre Seigneur Jésus, appelé « mon Élu ». L’élection du peuple Israël. Celle de Cyrus, roi de Perse. Enfin, l’élection des Douze… dont Judas !
>> Laquelle vous semble être l’élection d’hommes prédestinés au salut ?
Continuons : un lecteur aurait-il trouvé un seul verset biblique qui appuierait clairement les affirmations suivantes de l’auteur, qui constituent la doctrine-clé du calvinisme ? :
Dans sa forme la plus élémentaire, la prédestination signifie que Dieu décide de notre ultime destination – le ciel ou l’enfer – non seulement avant que nous y arrivions, mais aussi avant même notre naissance.
La prédestination nous enseigne que notre ultime destinée repose entre les mains de Dieu. p 22
Voici une autre façon de présenter les choses : De toute éternité, avant que nous n’existions, Dieu a décidé de sauver certains membres de l’humanité et de laisser périr les autres. Dieu a fait un choix : il a choisi de sauver certaines personnes en vue de les bénir éternellement au ciel et d’en laisser d ‘autres subir les conséquences de leurs péchés dans les tourments éternels de l’enfer. p 22, 23
L’auteur avoue qu’il ne sait pas pourquoi Dieu agit ainsi, mais il s’empresse de tenter de démontrer que Dieu a le droit de faire miséricorde à qui il veut et de la refuser à qui il veut, ce que nous ne contestons bien-sûr pas.
Mais vraiment, qui fournira un seul passage biblique qui soutient clairement cette doctrine proclamée ici par notre auteur ?
Compléments
Éphésiens 1.4,5 : Élus dès avant la fondation du monde ?
(article composé complété le 31.10.2021 par une 6e précieuse contribution !)
Galates 1.15 : Sommes-nous prédestinés au ciel ou à l’enfer avant notre naissance ?
David Shutes : Annexe : La prédestination
Dudley Ward : Qui sont les élus ?
Jacques Marchal : La prédestination
Ne confondez pas le bonheur et le plaisir
Un commentaire reçu par mail
Il y a plusieurs commentaires ci-dessous. Mais Richard DOULIERE m’a envoyé le sien par mail. Le voici en copié-collé :
Je trouve que les divergences de compréhension à propos de ce thème de la prédestination viennent de ce qu’ on cite les textes qui contiennent le verbe ‘destiner à l’avance’ sans tenir compte du contexte.
Ainsi d’Éphésiens 1 dont le verset 12 montre bien que les personnes concernées sont les Juifs (ceux qui ont d’avance espéré et attendu le Christ) en opposition à ce « nous aussi » du verset 13 que sont les païens qui ont dû entendre la proclamation de l’Évangile avant d’y croire ! Est-ce vraiment contestable ?
Du même texte, on rejoint ce que tu disais de celui de Romains 8.
Le texte ne dit-il pas assez clairement à quoi l’on est destiné ?
En Romains, tu l’as dit : à être un jour rendu semblable au Fils et en Éphésiens, pour les Juifs (comme collectivité) à servir à la louange de la grâce de Dieu, cette grâce se manifestant par le maintien de la vocation (élection) qu’il leur a adressée en dépit de leur incrédulité.
Nulle part il n’est question du salut ! Ces éléments sont si clairs à mes yeux que si on les refuse, on ébranle la base même de la théologie.
Le texte qui me semble moins aisé à comprendre est Romains 9. Pourtant, là non plus, il n’est question du salut, ce que tu as dit à juste titre.
Là où je pourrais sembler donner raison à Sproul ou à ceux qui le soulignent, c’est quand on mentionne le don de la repentance et de la foi. Car je crois effectivement que personne ne peut croire sans que l’Esprit l’y ait préparé et lui en ait donné la capacité. Mais la question n’est pas de savoir si l’Esprit ne le fait que pour des prédestinés, mais de savoir si la liberté humaine ne consiste pas dans la possibilité de l’être humain d’accueillir ou de refuser cette action préparatoire de l’Esprit. Ce qui est appelé le péché contre l’Esprit (le seul qui ne puisse bénéficier du pardon) n’est-il pas précisément ce refus conscient de l’action convaincante et préparatoire de l’Esprit ?
L’autre problème permanent (tu l’as également touché brièvement), c’est la confusion entretenue entre destination à l’avance et élection. Cette dernière est absolument souveraine. Quand on les mélange, alors la « prédestination » le devient aussi. mais tu as bien dit aussi que l’élection d‘Israël, de Cyrus et de Judas montre bien que ce n’est pas non plus au salut que se rapporte l’élection.
Merci pour l’article et les commentaires de l’esprit dans lequel tout a été écrit. Il est si rare de voir échanger sur cette question sans mépris ni condescendance ! »
Merci Richard ! Sois tranquille, je ne validerais simplement pas un commentaire méprisant et condescendant ! 🙂
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Voici un passage qui semble aller dans le sens de la double prédestination
Romain 9:21-23
21 Le potier n’est-il pas maître de l’argile, pour faire avec la même masse un vase d’honneur et un vase d’un usage vil ? 22 Et que dire, si Dieu, voulant montrer sa colère et faire connaître sa puissance, a supporté avec une grande patience des vases de colère formés pour la perdition, 23 et s’il a voulu faire connaître la richesse de sa gloire envers des vases de miséricorde qu’il a d’avance préparés pour la gloire ?
D’ailleurs Romain 9 en entier semble appuyer la double prédestination
Merci beaucoup, Ranto ! Deux remarques :
– Si vous croyez en la prédestination au salut, j’apprécie que vous entendiez par là ce qu’on appelle la « double prédestination », car je n’ai jamais compris qu’on puisse croire en une prédestination au salut qui ne serait pas couplée avec une détermination à la perdition de ceux qui n’ont pas le privilège de faire partie des heureux élus… :
– Si Romains 9 parlait réellement de la prédestination au salut, vous pourriez effectivement avoir raison de la défendre.(En zappant toutefois les nombreux passages bibliques qui disent le contraire !)Puis-je vous suggérer de jeter un coup d’œil à ma modeste analyse de Romains 9 (qui s’appuie dur des travaux de théologiens biblicistes quand même) ?
C.S : Romains 9 (1) : Un peuple, canal de la rédemption
C.S : Romains 9 (2) : Les libres choix de Dieu
C.S : Romains 9 (3) : Un potier sage et avisé
C.S : Romains 9 (4) : Ressources théologiques
Rubrique « Articles » Fraternelles salutations, Claude
Merci pour l’article. Pour faire suite à la demande de verset qui appuierait le principe de prédestination, je suggère le psaume 139:16 « Quand je n’étais qu’une masse informe, tes yeux me voyaient ; Et sur ton livre étaient tous inscrits Les jours qui m’étaient destinés, Avant qu’aucun d’eux existât. »
Pour ma part, la prédestination n’enlève en rien notre responsabilité. Pour prendre un exemple, le psaume 41.9 annonce que celui qui trahirait Jésus serait parmi ses intimes. Par contre, Jésus en parlant de lui dit : « Mieux vaudrait pour cet homme qu’il ne fût pas né. » (Marc 14.21). Ce n’est pas parce que Dieu savait à l’avance que Judas trahirait Jésus qu’il n’en est pas responsable. Un autre exemple plus positif avec l’annonce par Esaïe de ce que Cyrus ferait un bon siècle plus tard. Quoi d’étonnant dans ce cas que Dieu puisse connaître d’avance nos actions, et notre désir de le suivre, ou notre obstination à marcher sans lui ?
La question que soulève la prédestination, c’est en fait, comment est-ce que Dieu fait pour connaître tout d’avance ? Puis-je avancer ce qui serait pour moi une explication ? Mais a-t-on vraiment besoin d’explications… Voici en tout cas ma pensée personnelle, c’est que le temps a également été créé, tout comme l’espace. Et si le Père est créateur, il ne peut être soumis à ce temps. Il est en dehors de cette notion d’espace-temps. Par contre, le fils y a pris part, et ce serait pourquoi nous trouvons dans le proverbes 8.22 une allusion aux premiers jours du Christ, avant même « le premier atome de la poussière du monde » (Pro 8.26).
Bien amicalement,
Jonathan PIRA
Merci pour ton commentaire, Jonathan ! Je suis plutôt d’accord avec tout ce que tu écris, c’est conforme à ce que j’ai déjà publié. Notamment, tes réflexions sur la prescience de Dieu, sa souveraineté sur le temps et l’espace.
Permets-moi juste de préciser ceci par rapport au verset sollicité, il ne concernait pas la réalité de la prédestination des chrétiens (il y en a 4 !), ni l’élection de tous les pécheurs pour le salut ou encore celle des croyants pour le service (il y en a beaucoup !). Non, mon défi se limite à découvrir un verset qui soutient l’affirmation de l’auteur du déterminisme divin qui stipulerait :
– que Dieu aurait décidé de sauver certains et donc de leur accorder le don de la repentance et de la foi
– et que Dieu aurait de même décidé souverainement qu’il exclurait d’autres du salut, et donc, qu’il leur refuserait le don de la repentance et de la foi.
Il ferait naître les uns de nouveau pour qu’ils se convertissent immanquablement, et aux autres, il refuserait ces grâces, ayant décidé de les laisser dans leur péché et leur perdition.
C’est là où personnellement je ne vois aucune base biblique…
Cher Claude,
Étant théologien non pratiquant, j’ai hésité à écrire, au risque de ne seulement aligner des mots…. Je me retrouve dans tes écrits et argumentation. A force de fréquenter des théologiens, le risque est de ne plus pouvoir en retirer autre chose que des interrogations ( ce serait la même chose à fréquenter des philosophes ou des psychanalystes ( mes études d’éducateurs ont vu passer cela…).
En fin de compte, personnellement je choisis de demeurer dans ma perception d’une lecture d’ensemble de la Parole. Ce qui en ressort pour moi est la justice de Dieu qui ne se trompe pas et ne nous trompe pas. Comment pourrais-je appréhender plus que ce qui est écrit par l’Incréé …?
Alors, je dépose ce paquet, avant qu’il ne me soit fardeau, et espère, espère, confiant, en apprenant à me cramponner à quelques promesses, souhaitant avoir la faiblesse d’y croire.
Denys
Tu as raison, en ce qui te concerne ! Ce n’est pas demandé à tout le monde de se plonger dans ces investigations chronophages ! Continue à « pratiquer » fidèlement la Parole, dans son objectif de nous transformer à l’image de Christ ! Amitiés !
Merci pour cet article, avec comme toujours le ton charitable qui te correspond bien. Hâte de découvrir la suite de la série.
Salutations fraternelles au Lucky Luke de cette page, qui a posté son commentaire une dizaine de minutes après avoir eu l’article ! 🙂