Dans le 1e article sur l’expiation, Luciano Branco a montré la portée universelle de l’expiation. (Luciano Branco : L’expiation – 1 ) Ici, il veut prendre en compte le fait indéniable que tous les hommes ne seront pas sauvés. et propose sa vision de ce paradoxe :
Le paradoxe de l’expiation
Il faut néanmoins reconnaitre qu’il existe un paradoxe dans la Parole de Dieu quant à l’expiation ! D’une part, Jésus est mort pour le monde entier, et d’autre part, seuls ceux qui ont la foi profitent pleinement des bienfaits de l’expiation. Jésus est bel et bien le Sauveur du monde entier, de tous les hommes sans exception. Mais, force est de constater que l’expiation du Christ ne sera néanmoins profitable qu’aux élus, c’est-à-dire à tous ceux que Dieu a prédestinés dès avant la fondation du monde ! (Ep 1.4 ; 11)
Les élus qui profiteront de l’œuvre expiatoire du Christ choisiront celui qui, au préalable, les aura choisis!
Jn 6.37 : Tous ceux que le Père me donne viendront à moi, et je ne repousserai pas celui qui vient à moi.
v 39 : Or, celui qui m’a envoyé veut que je ne perde aucun de ceux qu’il m’a donnés, mais que je les ressuscite au dernier jour.
v 44: Personne ne peut venir à moi si le Père qui m’a envoyé ne l’attire, et moi, je le ressusciterai au dernier jour.
v 65 : Aussi ajouta-t-il : C’est bien pour cela que je vous ai dit : Personne ne peut venir à moi si cela ne lui est accordé par le Père.
Jean 10.29 :Mon Père qui me les a données est plus grand que tous, et personne ne peut arracher qui que ce soit de la main de mon Père.
Jean 13.18 : Je ne parle pas de vous tous : je sais très bien quels sont ceux que j’ai choisis mais il faut que l’Écriture s’accomplisse : Celui avec lequel j’ai partagé mon pain se retourne contre moi.
Jean 15.16 : Ce n’est pas vous qui m’avez choisi. Non, c’est moi qui vous ai choisis ; je vous ai donné mission d’aller, de porter du fruit, du fruit qui soit durable.
Quel mystère, n’est-ce pas ?
Mais il n’en est pas du don gratuit comme de la faute ; car, si par la faute d’un seul, beaucoup (c’est-à-dire tous) sont morts, à plus forte raison la grâce de Dieu et le don qui vient de la grâce d’un seul homme, Jésus-Christ, ont-ils été abondamment répandus sur beaucoup (c’est-à-dire tous ceux qui se sont associés à l’œuvre rédemptrice) » (Rom 5.15).
Charles HODGE, théologien calviniste du 19ème siècle, déclarait sur ce sujet :
« Dans un sens, Christ est mort pour tous, et dans un autre sens, il est mort pour les seuls élus ». (NICHOLLS, B., J., (The exclusiveness and inclusiveness of the gospel « , Themelios, N° 4/2, Janv. 1979.
Comme le fait aussi remarquer Paul WELLS : « les calvinistes ne nient pas que Christ soit mort pour tous les hommes. En effet, une alliance de grâce est établie en Christ avec toute l’humanité… Seulement, l’efficacité de la croix n’est pas la même pour les non-croyants et pour les croyants ; elle ne suscite pas les mêmes fruits chez tous.». (NICOLE, Roger, » John Calvin’s View of the Extent of the Atonement « , Westminster Theological Journal, N° 47, 1985, pp. 197-225.)
Ces deux représentants du calvinisme (Charles HODGE et Paul WELLS) rejettent une expiation limitée stricte et préfèrent nuancer en affirmant que l’expiation est bel et bien pour tous, mais que tous n’en jouiront pas d’une manière efficace !
En effet, il n’y a pas d’universalisme dans le salut et tous ne jouiront pas des bienfaits attachés au salut. C’est pour cela que, paradoxalement, l’on trouve aussi beaucoup de versets sur l’expiation qui s’adressent exclusivement au peuple de Dieu, comme nous pouvons le constater ci-dessous : –
Il s’est donné lui-même pour nous, afin de nous racheter de toute iniquité, et de se faire un peuple qui lui appartienne, purifié par lui et zélé pour les œuvres bonnes (Ti 2.14)
… tu as été immolé et tu as racheté pour Dieu, par ton sang, des hommes de toute tribu, de toute nation ; tu as fait d’eux un royaume et des sacrificateurs pour notre Dieu, et ils règneront sur la terre (Ap 5.9-10)
… le Saint Esprit vous a établis évêques, pour faire paître l’Église de Dieu qu’il s’est acquise par son propre sang (Ac 20.28)
C’est aussi à cause de nous, à qui cela sera compté, nous qui croyons en celui qui a ressuscité d’entre les morts Jésus notre Seigneur, livré pour nos offenses, et ressuscité pour notre justification (Rom 4.24- 25)
Vous êtes une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple racheté… (1 Pi 2.9)
C’est lui (Jésus) que Dieu a destiné comme moyen d’expiation pour ceux qui auraient la foi en son sang, afin de montrer sa justice… (Rm 3.25)
Sur le sujet, nous citons maintenant Henri Blocher dans un de ses articles pour la Revue réformée : « Calvin admettait la formule qui remonte à Pierre Lombard, l’œuvre rédemptrice du Christ suffisante pour tous, mais efficace pour les seuls élus, tout en montrant chaque fois son insatisfaction. Il n’a pas enseigné l’universalisme hypothétique, mais il n’a pas pour autant professé la doctrine particulariste ». (La revue de théologie de la Faculté de Jean CALVIN, La Revue réformée, article n°254, Justice de Dieu et expiation rédemptrice selon Jean CALVIN.)
Une véritable tension théologique émerge dans la doctrine de l’expiation comme nous le font remarquer Henri BLOCHER, Charles HODGE et Paul WELLS. L’expiation n’a pas, selon de qui on parle (perdus ou élus) la même définition quant à son résultat.
Les pièges à éviter dans notre compréhension de l’Expiation
Deux excès nous guettent dans ce genre de réflexion.
Le premier, c’est un universalisme sotériologique qui rend homéopathique le mandat de l’évangélisation puisque tous sont sauvés ! La nécessité de la foi comme moyen de salut serait alors inexistante. Plus de repentance, plus de conversion… La responsabilité de l’individu lui serait tout bonnement enlevée !
À un autre niveau, le refus d’admettre que l’expiation se distingue quant à son fruit envers le peuple de Dieu serait aussi une conséquence d’un universalisme exagéré. Ne pas admettre et distinguer les effets de l’expiation serait une erreur. Il est évident que seuls les élus profitent pleinement de la rédemption. C’est d’ailleurs ce qui les distingue des perdus, n’est-ce pas ?
Certains tourneront le dos au salut et d’autres en jouiront. Il s’agit évidemment de ceux que Dieu a prédestinés dès avant la fondation du monde ! Sur quels critères sont-ils prédestinés ? Un vaste sujet que nous n’entamerons pas aujourd’hui. Retenons simplement que l’intimité de Dieu quant à ses décrets ne nous a pas été révélée.
Le deuxième excès possible est la réduction de l’expiation au point que l’évangélisation n’ait plus pour motivation le salut mais la récolte des élus.
La prédication de l’Évangile se verrait désaxée et exclusivement centrée sur le peuple de Dieu. Notons néanmoins que les protagonistes de cet excès affirmeront qu’ils ne savent pas qui sont les élus dans le monde.
Alors que l’humanité dans son intégralité a besoin d’entendre le message d’amour exprimé par Dieu au monde au travers de la croix, les partisans d’une expiation limitée proclament un amour exclusivement réservé !
L’amour de Dieu envers le monde entier n’altère et ne diminue en rien sa relation filiale et particulière de Dieu envers ses enfants. Notre préoccupation ne peut et ne doit pas être le nombre des élus !
Dans ces deux excès, nous observons au moins quatre fondements qui sont mis à mal. Plus étonnant encore, que l’on soit pour l’universalisme sotériologique ou pour un particularisme (expiation limitée), ce sont les mêmes domaines qui en souffrent comme vous pouvez le voir ci-dessous :
Points touchés par une mauvaise interprétation
Versets clés sur le sujet L’Amour de Dieu : Jn 3.16
La prédication de l’Évangile : Rom 10.17
L’Évangélisation : 1 Co 10.33
L’œuvre rédemptrice de Christ: 1 Jn 2.2
Contentons-nous de dire, avec Henri BLOCHER : « Il est permis d’espérer ; il est plus sage de ne pas spéculer ni tenter de scruter les secrets de l’élection divine. Efforçons-nous d’entrer… efforçons-nous de gagner le plus grand nombre… d’en sauver de toute manière quelques-uns » :
J’ai été faible avec les faibles, afin de gagner les faibles. Je me suis fait tout à tous, afin d’en sauver d afin d’en sauver de toute manière quelques-uns. Je fais tout à cause de l’Évangile, afin d’y avoir part ! (1 Cor. 9 : 22).
Nous, peuple de Dieu :
Réjouissons-nous car Dieu nous aime !
Réjouissons-nous car Dieu sauve !
Réjouissons-nous car Dieu est bon !
Réjouissons-nous car Dieu nous a élus !
Vous, monde perdu : Réjouissez-vous, car Dieu vous aime !
Réjouissez-vous car Dieu vous fait grâce par le moyen de la foi !
Réjouissez-vous, car Dieu veut que tous soient sauvés !
Réjouissez-vous car Dieu vous invite aujourd’hui ! « Aujourd’hui, si vous entendez sa voix, n’endurcissez pas vos cœurs… » (Hé 3.15)
Luciano BRANCO,
Luciano est pasteur de l’Église Évangélique Baptiste de Toulon
La mort de Jésus vraiment efficace que pour des élus prédéfinis ?
L’article 3 se propose d’approfondir certaines affirmations classiques à ce sujet pour progresser ensemble ! C.S : L’expiation – 3
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