La prédestination est-elle un mystère ?

par Dudley WARD

De nombreux chrétiens ont grandi avec l’idée que les doctrines de la prédestination et de l’authentique liberté de choix de l’homme sont des «mystères » inconciliables au sens habituel de ce terme.

Le dictionnaire a défini ainsi le sens premier de la prédestination :
« Acte par lequel Dieu a ordonné d’avance tout ce qui se produira. »

Les mystères dont parle la Bible

Il est dit en 1 Timothée 3.9,16 que la foi et la piété sont des mystères.
En 2 Thessaloniciens 2.7, Paul parle également de l’impiété comme d’un mystère. Mais il déclare aussi la chose suivante :
« … le mystère caché de tout temps et dans tous les âges, mais révélé maintenant à ses saints. Dieu a voulu leur faire connaître la glorieuse richesse de ce mystère parmi les païens, savoir : Christ en vous, l’espérance de la gloire »  (Co 1.26-27, italiques ajoutés).

L’apôtre Paul, qui rappelle que Dieu nous a révélé des choses autrefois cachées, reprend la même pensée dans sa lettre aux Éphésiens :
« … nous faisant connaître le mystère de sa volonté, selon le bienveillant dessein qu’il avait formé en lui-même, pour le mettre à exécution lorsque les temps seraient accomplis, de réunir toutes choses en Christ, celles qui sont dans les cieux et celles qui sont sur la terre » (Ep 1.9-10, italiques ajoutés).

Dans ces contextes, le mot grec traduit par « mystère » désigne une vérité révélée par opposition à une vérité cachée.

Ces versets montrent donc clairement qu’en Christ, Dieu veut révéler le mystère de l’Évangile et non le cacher, comme le souligne la requête de Paul:
« Priez pour moi, afin qu’il me soit donné, quand j’ouvre la bouche, de faire connaître hardiment et librement le mystère de l’Évangile »
(Ép 6.19, italiques ajoutés).

Paul écrit :
« C’est par révélation que j’ai eu connaissance du mystère sur lequel je viens d’écrire en peu de mots. En les lisant, vous pouvez vous représenter l’intelligence que j’ai du mystère de Christ. Il n’a pas été manifesté aux fils des hommes dans les autres générations, comme il a été révélé maintenant par l’Esprit aux saints apôtres et prophètes de Christ. Ce mystère, c’est que les païens sont cohéritiers, forment un même corps, et participent à la même promesse en Jésus-Christ par l’Évangile, » (Ep 3.3-6).

Il ajoute:
« et de mettre en lumière le moyen de faire connaître le mystère caché de toute éternité en Dieu qui a créé toutes choses; c’est pourquoi les dominations et les autorités dans les lieux célestes connaissent aujourd’hui par l’Eglise la sagesse infiniment variée de Dieu,» (Éphésiens 3.9-10).

Romains 16.25-27 exprime la même vérité :
« A celui qui peut vous affermir selon mon  Évangile et  la  prédication de Jésus-Christ, conformément à la révélation du mystère caché pendant des siècles, mais manifesté maintenant par les écrits des prophètes, d’après l’ordre du Dieu éternel, et porté à la connaissance de toutes les nations, afin  qu’elles obéissent  à la foi, – à Dieu, seul sage, soit la gloire aux siècles des siècles, par Jésus-Christ! Amen! »

Le Nouveau Testament s’efforce de clarifier l’Évangile,
non de le mystifier.. 

Et qu’en est-il de la prédestination ?

La prédestination et l’authentique liberté de l’homme de choisir ne font-elles pas partie du « mystère de l’Évangile » ? Ne sont-elles pas des parties intégrantes du plan rédempteur de Dieu ? Puisque la Bible ne présente nulle part la prédestination comme une réalité qui continue d’être mystérieuse et cachée, quel est l’intérêt de mystifier cette vérité aujourd’hui ? Notons une fois de plus l’expression récurrente dans toutes ces références bibliques : « faire connaître le mystère de l’Évangile ».

Paul n’a jamais tenté de reléguer les thèmes de la prédestination, de l’élection, du choix ou du libre arbitre dans la sphère des choses cachées. Calvin maintient pourtant que Dieu n’a pas seulement une volonté ‘ révélée’, mais également une volonté ‘ secrète’, qui est différente de la première et peut la contredire. Permettez-moi de vous dire de la façon la plus catégorique que Dieu n’a pas une deuxième volonté, secrète, qui peut agir indépendamment de la volonté révélée et peut être en désaccord avec elle. Paul savait que nous pouvons toujours être assurés que notre Père céleste est loyal et franc avec ses enfants. C’est seulement avec ses ennemis qu’il agit autrement :pmp
« Avec le pervers tu agis selon sa perversité » (Ps 18.26).

Nous reconnaissons toutefois qu’il y a des secrets que Dieu le Père partage avec son Fils et avec le Saint-Esprit, et qu’il en existe d’autres qu’il cachait volontairement à son Fils, du moins lorsque celui-ci était sur la terre. Ainsi Matthieu 24.36 déclare que Jésus ne connaissait pas le moment exact de son retour sur la terre. Dieu n’est pas tenu de nous révéler des secrets précieux. Notre entrée dans la gloire céleste marquera le début d’une phase d’apprentissage de choses si merveilleuses que nous n’aurions jamais pu imaginer tant que nous étions sur la terre.

Pourtant, Dieu décide parfois de révéler des secrets à des serviteurs qu’il a choisis. Le livre de Daniel montre clairement que Dieu dit à son serviteur des choses que celui-ci n’aurait jamais pu connaître par l’observation ou la déduction, comme le rêve de   Nebucadnetsar relatif à des événements futurs. Au cours d’une vision nocturne, Daniel reçut une révélation du Saint-Esprit, et il sut exactement ce qui se passait dans l’esprit du roi.
Dieu lui révéla le rêve dans tous ses détails.
« Il y a dans les cieux un Dieu qui révèle les mystères, et qui a fait connaître au roi Nebucadnetsar ce qui arrivera dans la suite des temps. Voici ton rêve et les visions que tu as eues dans ton lit » (Dn 2.28).
Daniel entreprend ensuite d’indiquer au roi le contenu de son rêve surnaturel. Dans 2 Corinthiens 12.2-4, Paul fait part des révélations du troisième ciel qui l’auraient enflé d’orgueil à cause de leur excellence, s’il n’avait pas reçu une écharde dans la chair pour que sa faiblesse le garde dans l’humilité.

En abordant les épîtres du Nouveau Testament, force est de constater que l’importance des secrets de Dieu diminue considérablement. Pourquoi ? Parce qu’une nouvelle ère s’est ouverte. Dieu a accompli son salut dans l’espace et dans le temps ; son plan est désormais pleinement et merveilleusement dévoilé.

Un désir suprême de notre Père céleste est de nous révéler son plan majestueux et compatissant pour atteindre les perdus. Comprenons bien que les pages du Nouveau Testament ne masquent pas la stratégie de la rédemption, avec ses composantes de prédestination, d’élection, de prescience et de libre arbitre, mais la dévoilent pleinement. Dieu n’a jamais voulu que ces facettes de son activité rédemptrice soient l’objet de devinettes, de contradictions apparentes et de problèmes insolubles.

Alors, qu’est-ce que la prédestination ?

Calvin enseignait que pour être pleinement glorifié, Dieu « ignore » tous ceux qui ne sont pas élus et décrète qu’ils doivent subir avec raison sa juste colère en enfer comme sanction méritée à cause de leurs péchés.
Y a-t-il une idée « chrétienne » qui soit moins charitable ou moins juste que celle de Dieu rejetant systématiquement des êtres humains non encore nés pour qu’ils restent inévitablement et irrémédiablement incrédules et voués à l’enfer ? Le Seigneur ne prend absolument nul plaisir dans la méchanceté et dans la mort du méchant, comme le montre Ézéchiel 33.11 :

« Dis-leur : Je suis vivant ! dit le Seigneur l’Éternel,
ce que je désire, ce n’est pas que le méchant meure,
c’est qu’il change de conduite et qu’il vive.
Revenez, revenez de vos mauvaises voies.
Pourquoi devriez-vous mourir, maison d’Israël ? »

Conscients que nous devons nous garder de pousser les illustrations trop loin, nous pourrions par exemple comparer la prédestination à un voyage en chemin de fer. Un adolescent prend le T.G.V. à Paris pour aller rendre visite à des amis à Marseille. Sa mère l’a aidé à faire sa valise et lui a préparé un bon casse-croûte. Il y a déjà longtemps que la S.N.C.F. a prévu et affiché les horaires ainsi que la destination. Le train quittera Paris à midi et arrivera à Marseille vers 15h30, avec des arrêts à Lyon et Valence. Il comporte un bar et un wagon-restaurant ; de plus il est non-fumeur. Par leur amour et leur serviabilité, les parents aident le jeune homme à atteindre son but et les autorités ferroviaires ont établi les horaires et prévu (prédestiné) les différentes prestations des mois à l’avance. Il n’empêche que le voyageur doit concrétiser sa décision, acheter le billet et monter dans le bon train.

Les options que choisira le client ne diminuent en rien l’autorité ou la «souveraineté » des dirigeants de la S.N.C.F. qui ont prévu toutes les possibilités dans l’intérêt du public. Le jeune homme choisit librement la réservation à bord d’un train précis. Pendant le trajet, il est libre de quitter son siège, de se dégourdir les jambes en déambulant dans l’allée ou le couloir, de se rendre au bar ou au wagon-restaurant. Pendant tout ce temps, le train continue imperturbablement son trajet à grande vitesse vers la destination fixée (prédestination). Le voyageur n’a aucune raison de se féliciter d’avoir acheté un billet et d’être monté à bord du train ; ces actions ne s’accompagnent d’aucun mérite personnel.

Je vais m’efforcer de montrer que Dieu a déjà accompli tout ce qu’il faut pour arracher au péché tout être humain sur terre, sans faire le moins du monde violence à sa liberté de choix. Il hait tout péché et s’y oppose vigoureusement. Après avoir fait tout ce qu’il fallait pour sauver n’importe quel pécheur, Dieu désire ne pas utiliser la contrainte. Les péchés résultent de choix humains plutôt que de décrets divins, contrairement à ce que Calvin voudrait nous faire croire.
Les sociétés qui se sont dotées d’un système judiciaire juste considèrent généralement les criminels avérés comme responsables de leurs actes ; une fois leur peine purgée, elles les font sortir de leur prison et leur donnent l’occasion de repartir à zéro et de mener une nouvelle vie.
Elles n’abandonnent jamais l’espoir d’un changement radical.
Dieu priverait-il l’individu de toute possibilité et de tout espoir de vie changée alors que la justice humaine le souhaite ?
Est-il conforme au caractère de Jésus de châtier une personne parce qu’elle persiste dans son péché, s’il ne lui offre aucun espoir possible de changement et de rédemption ?

Marquons une pause pour réfléchir au scénario suivant. Un enfant qui n’a pas demandé à venir au monde, qui possède une nature pécheresse qu’il n’a pas choisi d’hériter, péchera contre Dieu un jour ou l’autre.
D’après Jean Calvin, Dieu peut très bien avoir décidé avant même la naissance de cet enfant de le mettre à part pour passer l’éternité en enfer. Dieu ne fera donc rien pour répondre à son besoin de pardon et de rédemption. Il s’ensuit que si la destinée éternelle de tout individu est déterminée par la seule décision antérieure de Dieu, un bébé qui meurt en bas âge peut être destiné à l’enfer, alors qu’il n’a rien fait en tant qu’être humain pour mériter ce sort.
Un Dieu plein d’amour peut-il avoir créé certains êtres humains dans l’intention avérée de les tourmenter à jamais ?

En évoquant sa mort imminente, Jésus se sert d’une illustration tirée de la femme en travail :
«La femme, lorsqu’elle enfante, a de la tristesse, parce que son heure est venue ; quand elle a donné le jour à l’enfant, elle ne se souvient plus de sa douleur, à cause de la joie de ce qu’un homme soit venu au monde»
(Jn 16.21).

Pouvez-vous imaginer un seul instant que Jésus puisse parler de l’accouchement avec une telle note de joie s’il y avait le moindre risque que le nouveau-né soit déjà destiné aux peines éternelles ? Or, il ne fait aucun doute que c’est bien ce que Jean Calvin voudrait nous faire croire.

En appelant un tel scénario un mystère, les théologiens calvinistes donnent au mot mystère un sens illogique. Le vrai mystère est plutôt le fait qu’une action aussi grotesque ait pu être imaginée. Commençons donc par examiner où une telle distorsion de la vérité a pu se produire, sachant que la majorité des premiers Pères de l’Église ne partageait pas l’opinion de Calvin.

À propos des petits enfants rassemblés autour de lui, Jésus déclara :
« De même, ce n’est pas la volonté de votre Père qui est dans les cieux qu’il se perde un seul de ces petits » (Mt 18.14).
Tel était aussi le désir de Jésus. Dans ces conditions, aucun n’est-il allé en enfer ? Étaient-ils tous sans exception « prédestinés au salut » ?
Si, comme Calvin l’enseigne, la volonté de Dieu s’accomplit toujours sur la terre, alors à la lumière de ce verset, il serait quand même impossible que l’un quelconque de ces petits se perde.
Était-ce vraiment ce que Jésus voulait dire ?

C’est principalement Augustin d’Hippone, parfois appelé le « père du catholicisme romain », qui a introduit ces idées. Pouvez-vous imaginer dans le ciel un Père rempli d’amour qui laisse d’innombrables personnes continuer dans l’aveuglement sur le chemin qui mène à l’enfer sans lever le petit doigt ? C’est ici tout le sens de l’appel missionnaire lancé par Jésus dans Matthieu 28.19-20. Il veut que le vrai chemin leur soit indiqué. Pouvez-vous concevoir Jésus se conduire selon le scénario d’Augustin avec n’importe qui, lui qui a accueilli les petits enfants et a reproché aux disciples leurs pensées discriminatoires ?

« Alors on Lui amena des petits enfants, afin qu’il leur impose les mains et prie pour eux. Mais les disciples les repoussèrent. Et Jésus dit : Laissez les petits enfants, et ne les empêchez pas de venir à moi ; car le royaume des cieux est pour ceux qui leur ressemblent » (Mt 19.13-14).

Je le répète : nulle part la Bible ne présente la prédestination comme un «mystère ». D’ailleurs, aux passages où figurent les mots « destinés » ou «prédestinés » il n’est pas question d’individus sauvés pour le ciel ou condamnés à l’enfer. (cf. 1 Corinthiens 2.7 ; Romains 8.29-30 ; Éphésiens 1.5, 11.)

La prédestination ne précise pas qui est destiné à devenir chrétien, mais ce que le chrétien est destiné à devenir.

Dans Romains 8.29-30, nous lisons : « Car ceux qu’il a connus d’avance, il les a aussi  prédestinés à être semblables à l’image de son  Fils, afin que son Fils soit le premier-né de plusieurs frères. Et ceux qu’il a prédestinés, il les a aussi appelés ; et ceux qu’il a appelés, il les a aussi justifiés ; et ceux qu’iI a justifiés, il les a aussi glorifiés. »

Ce texte s’applique de façon collective à la multitude de ceux qui croiront en son nom. Il ne fait pas la distinction entre les individus qui auront cru et hérité des bénédictions, et ceux qui ne l’auront pas fait. Dieu a simplement prévu que les croyants deviendront frères et sœurs de Jésus par adoption et lui ressembleront de plus en plus. Pour montrer que Calvin n’a pas toujours suivi la pensée erronée d’Augustin concernant la vraie signification de la prédestination, voici ce que le réformateur genevois écrit dans son commentaire sur Romains 8.29 :

« L’autre mot grec [proorizo] mis ici, qu’on traduit communément prédestiner, se rapporte à la circonstance du présent passage.
Car St Paul entend seulement que Dieu a ainsi déterminé et ordonné que tous ceux qu’Il a adoptés, autant qu’ils sont, porteraient l’image du Christ. Au reste, il n’a pas dit simplement à être conformes à Christ, mais à l’image de Christ, afin de montrer qu’en Christ est le patron dépeint au vif, qui est proposé pour imitation à tous les enfants de Dieu.
Voici maintenant le sommaire de ceci : que l’adoption gratuite, en laquelle consiste notre salut, ne peut être séparée de cet autre décret et arrêt qui nous a assujettis à porter la croix, parce que nul ne peut être héritier des cieux, sans qu’auparavant il ait été fait conforme au Fils unique de Dieu. »¹

Notons  qu’ici,  à  propos  de la  prédestination,  Calvin,  par opposition à ses déclarations ailleurs, met l’accent où il le faut, c’est-à-dire sur la nature et la qualité de la vie chrétienne, et non sur le premier pas dans cette vie.

Que dire de cette déclaration :
« En lui, Dieu nous a élus avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints et irréprochables devant lui ; il nous a prédestinés dans son amour à être ses enfants d’adoption par Jésus–Christ, selon le bon plaisir de sa volonté. » ? (Ep 1.4-5)

L’apôtre ne dit pas que Dieu a choisi « certains d’entre nous » pour le salut avant la fondation du monde, mais qu’avant la  fondation du monde, il avait décidé que le salut s’opérerait en Jésus et par lui et qu’il se caractériserait par une vie d’amour et de sainteté pratiques.

L’accent porte avant tout sur la qualité de la relation et sur la nécessité de mener une vie sainte en tant qu’enfants d’adoption dans sa famille, et non en tant qu’esclaves.

La même pensée se trouve dans Éphésiens 1.11-12 :
 » En lui nous sommes aussi devenus héritiers, ayant été prédestinés suivant la résolution de  celui qui opère toutes choses d’après le conseil de sa volonté, afin que nous servions à  la louange de sa   gloire,  nous  qui  d’avance  avons  espéré  en Christ »

Puisque Dieu  veut que  personne ne périsse, il est bien entendu que l’expression « toutes choses » inclut sa résolution souveraine de préserver une authentique liberté de choix de l’être humain et de responsabilité à l’égard de tout péché connu.

À qui correspond le « nous » dont Paul parle ? Notons attentivement sa manière de s’exprimer. Il  ne  dit pas  « nous que Dieu a choisis  pour  être ses  enfants », mais « nous qui d’avance avons espéré en Christ. »
Ces passages révèlent qu’avant le commencement du temps, Dieu a prévu les moyens de nous faire entrer dans cet héritage merveilleux. Il nous sera accordé par Jésus-Christ, et tous ceux qui décident de croire en lui deviennent par sa grâce frères et sœurs de Jésus ; des enfants d’adoption, et non des esclaves.

Dès à présent, nous devons vivre à la louange de sa gloire au lieu de vivre pour nous-mêmes, et Lui ressembler chaque jour davantage. Dans ces passages de l’Écriture on ne trouve pas la moindre suggestion que Dieu choisit arbitrairement d’avance ceux qu’il veut sauver.

Que signifie l’adoption ?

Pour la plupart des penseurs calvinistes, être « adopté » est synonyme d’être « sauvé ». Ce n’est pourtant pas juste. Du temps de Paul, un homme réduit à l’esclavage pouvait retrouver la liberté par une décision de clémence du pouvoir en place. Il n’était alors plus la propriété de qui que ce soit, et il aurait de nouveau ultérieurement pu redevenir esclave.
Une personne pouvait également redevenir libre grâce à la rançon payée par une autre. Elle était délivrée de l’esclavage, sans être pour autant adoptée dans la famille de son bienfaiteur. Dans le meilleur des cas, le bienfaiteur achetait la liberté de l’esclave et l’accueillait non comme esclave, mais comme un membre à part entière de la famille. L’individu en question était alors à la fois libéré, sauvé et adopté.

Dieu ne nous a pas prédestinés en tant qu’individus à la rédemption ou à la condamnation, mais dans sa grâce et son amour immense, il a décidé que si nous acceptons son offre miséricordieuse, il ne nous sauverait pas seulement de nos péchés, mais qu’il nous adopterait de plus dans sa famille.
Quelle plénitude de vie de résurrection nous avons en Christ !

En Romains 8.15, Paul rappelle que nous avons reçu un Esprit qui fait de nous non des esclaves, mais des fils et des filles d’adoption du Roi des rois.

Remarquons que cette adoption est envisagée sous l’angle du futur en Romains 8.23 :
« Et ce n’est pas elle seulement mais nous aussi, qui avons les prémices de l’Esprit, nous soupirons en nous-mêmes, en attendant l’adoption, la rédemption de notre corps. »
Nous jouissons dès à présent et ici-bas des bienfaits de la délivrance garantie du pouvoir du péché, mais l’entrée en pleine jouissance de l’héritage de l’adoption doit encore attendre la résurrection de notre corps glorifié et le bannissement définitif du péché. C’est un indice supplémentaire que le salut et l’adoption ne sont pas la même chose.

1 Jean 3.1 indique l’essence de la prédestination :
« Voyez quel amour le Père nous a témoigné, pour que nous soyons appelés enfants de Dieu ! »
Nous sommes héritiers du royaume parce que nous sommes Ses enfants, et pas simplement ses esclaves.
« Or, si nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers : héritiers de Dieu, et cohéritiers de Christ, si toutefois nous souffrons avec lui, afin d’être glorifiés avec lui » (Ro 8.17)
. Dieu souhaite que nous devenions des membres à part entière de sa famille, et héritiers de toutes ses richesses par Jésus-Christ :
« Ainsi tu n’es plus esclave, mais fils ; et si tu es fils, tu es aussi héritier par la grâce de Dieu » (Galates 4.7).

 La prédestination indique le but, le destin que Dieu a fixé, avant le commencement  du temps, pour ceux qui croient en lui.

Par conséquent notre objectif fixé d’avance ne concerne pas l’œuvre par laquelle Dieu nous sauve, mais celle par laquelle nous devenons frères et sœurs de Jésus, transformés à sa ressemblance et vivant pour sa gloire.
Si la prédestination ne se réfère pas aux individus particuliers que Dieu a décidé de sauver, l’un de ses buts est d’encourager les chrétiens par l’assurance que le but fixé est la ressemblance à Jésus-Christ.

Celui qui est l’Auteur de notre foi est également celui qui la mène à la perfection (Hébreux 12.2). Dieu nous donne ainsi l’assurance qu’un jour nous lui ressemblerons lorsque nous le verrons face à face, quand bien même aujourd’hui nous nous sentons bien imparfaits spirituellement.
« Bien-aimés, nous sommes maintenant enfants de Dieu, et ce que nous serons n’a pas encore été manifesté ; mais nous savons que, lorsqu’il paraîtra, nous serons semblables à lui, parce que nous le verrons tel qu’il est» (1 Jn 3.2).

Dieu a fixé dès avant la fondation du monde la nature, le but, la qualité et la destinée véritables de la vie chrétienne authentique.

Le secret est éventé ! Il ne peut y avoir aucun doute ! Nous sommes tous invités à faire partie de la maisonnée de Dieu, non comme des serviteurs, mais comme des frères et des sœurs de Jésus. D’autres facettes de la rédemption sont peut-être encore cachées à nos yeux, mais le  fondement solide central sur lequel nous pouvons tous nous édifier mutuellement est le fait immanquable suivant : nous pouvons tous être marqués par une sainteté attrayante grâce à l’œuvre rédemptrice de Christ en notre faveur.

Nous pouvons désormais lire les versets suivants en tenant compte de leur signification et de leur emphase vraie.
« En lui, Dieu nous a élus avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints et irréprochables devant lui ; il nous a prédestinés dans son amour à être ses enfants d’adoption par Jésus-Christ, selon le bon plaisir de sa volonté » (Ep 1.3-5) et :
« Car ceux qu’il a connus d’avance, il les a aussi prédestinés à être semblables à l’image de son Fils, afin que son Fils soit le premier-né de plusieurs frères » (Ro 8.29).

La prédestination ne précise pas qui est destiné à devenir chrétien, mais ce que le chrétien est destiné à devenir.

¹Commentaires bibliques, Ép. aux Romains, éditions Kerygma, 1978, p. 201.

Dudley WARD se définit comme missionnaire, engagé avec son épouse Jill dans l’évangélisation, la distribution de littérature, l’encouragement des serviteurs de Dieu dans leur passion pour le ministère chrétien.
Cette série d’articles est tirée du livre de Dudley, « Programmés par Dieu ou libres de le servir ? » aux Editions Oasis (épuisé, mais j’ai encore quelques exemplaires). 
Vous pouvez écouter son message 
ici : https://www.youtube.com/watch?v=dh1GFyR72Ck   et https://www.youtube.com/watch?v=u-vKC6FwA7g