Vibrations

Il a été mon ami le plus proche pendant l’enfance et l’adolescence. Aujourd’hui encore, une belle complicité nous unit d’autant plus que nous servons le même Seigneur : j’ai nommé mon cher frérot, Francis…

2013… À la radio, j’écoute San Francisco, l’hymne hippie, chanté par Scott McKenzie en 1967. Ça me fait toujours le même effet.
La mélodie est plaisante, et la voix prend aux tripes par sa pureté.
Je m’arrête aux paroles du « pont » : « Par tout le pays, une étrange vibration…  Toute une génération avec une nouvelle explication. »
C’est exactement ce que j’avais ressenti en… 1967, quand j’ai découvert cette chanson. J’avais 14 ans.

Une étrange vibration

Sur un poste Radiola, saupoudré de la farine de mon cher papa pâtissier, j’ai ressenti cette étrange vibration. C’était un solo de guitare de Jimi Hendrix, avec force distorsions. Grâce à sa pédale wah wah, j’avais l’impression que les murs de l’échoppe avançaient et reculaient.
On parlait alors de musique psychédélique. La drogue n’était pas loin.
Mais, grâce à Dieu, j’ai été préservé de ces expériences hallucinogènes.

Mon ami de lycée m’avait appris les premiers accords de guitare sur un hit de Polnareff. Il voulait aussi m’initier à la cigarette. La chansonnette, j’étais… d’accord, la cigarette, non ! Là aussi, j’en étais gardé. Pourquoi ? J’étais chrétien, déjà, et cela donnait une stabilité à ma jeune vie !
Cela ne m’empêchait pas de vibrer avec mon siècle, au contraire.
Je ressentais profondément qu’il y avait dans ce courant artistique de l’underground américain une vraie recherche de nouvelle fraternité, des valeurs profondes, un essai de contre-culture.

O happy day !

Cher transistor, que mon frère Claude et moi écoutions avidement !
Un autre jour de 1967, j’entends une chorale gospel, avec une partie de piano absolument époustouflante. « O happy day ! » 
Comme j’étais fier de ce que Jésus était de nouveau devenu sortable ! Même notre Johnny national chantait de lui !
Les paroles de ce gospel étaient fortes, basiques ! « Oh jour heureux, quand Jésus m’a lavé de mes péchés ! » Un de mes copains hippisants est mort alcoolique à l’aube de ses quarante ans, sans avoir trouvé la réponse à ses questions, sans avoir vécu ce jour heureux.

Activismes

En mai 68, c’est justement ce copain qui voulait que je fasse une chanson militante. Je sentais que quelque chose d’important se passait dans la société, mais je n’étais pas bien intégré dans le cercle des contestataires les plus virulents, qui étaient surtout… enfants de notables !
Donc, je n’ai pas fait cette chanson à la Dylan. Par contre, mon premier chant était un verset biblique que je lisais sur le mur de notre chambre, et avec les trois accords de la « Poupée qui fait non » de Polnareff !
Ma première affiche, ronéotée en 4 couleurs était de style psychédélique, pour annoncer des soirées de films chrétiens organisées par le groupe de jeunes[1]. Je voulais répondre à l’art par l’art ! Rebondir sur ce qui m’avait ému en utilisant le même vocabulaire, et en glissant mes réponses.

Une nouvelle explication

Plus tard, lors de mes études à Strasbourg, j’ai hanté la librairie underground de la rue des Veaux, feuilletant des magazines comme Actuel, avec des BD de Crumb et de Shelton.
À l’internat, le soir, nous écoutions des 33 tours de groupes mythiques aux barbes de prophètes. Il y avait d’ailleurs quelque chose de prophétique dans leur message halluciné. Les belles litanies de Léonard Cohen, les imprécations de Bob Dylan, j’y discernais un diagnostic sans appel de l’état de notre société de consommation. J’entendais[2] le cri d’une génération à la recherche d’une nouvelle explication. Et mon cœur brûlait au-dedans de moi : j’en avais une, je l’avais trouvée ! Pour moi, Jésus-Christ était le remède aux maux décrit par ces artistes. Comment le partager ?

Jésus superstar.

  1. Je m’en souviens, je repeignais un mur en un rose laiteux quand j’ai entendu la chanson « Jésus, reviens sur terre ! » d’un certain Jeremy Faith[3].
    J’étais fier que sur les ondes nationales, on parle de Jésus, le grand oublié, mon meilleur ami. « Sauve-nous ! » Cette génération perdue avait besoin d’un Sauveur !

Les paroles disent à peu près ceci :

Des nations en guerre, des ségrégations,
de l’amour de la mort, sauve-nous !
Jésus, ne veux-tu pas revenir sur terre ?
Destruction de l’amour, destruction du bonheur,
destruction de la liberté, destruction du monde, sauve-nous !

Jésus, ne veux-tu pas revenir sur terre ?
Sauve-nous du diable, sauve-nous de Satan,
sauve-nous de l’enfer, sauve-nous !
Jésus, ne veux-tu pas revenir sur terre ?

C’était écrit en anglais par des francophones et chanté par un Tyrolien ! Mais ça passait sur « Salut les Copains », dans le droit fil de la Jesus revolution : Partout, aux États-Unis, des jeunes se détournaient de la drogue en se tournant vers Jésus. Jésus était à la une des magazines, et sur des pochettes de disque kitchissimes[4].

Bonne nouvelle… rejetée !

Avec mes amis du Groupe Biblique Universitaire, je tenais un stand biblique au resto-U. Il y avait partout une soif d’entendre une nouvelle explication, et sur ce parvis, les adeptes de Krishna, avec un harmonium et des cymbales dansaient entre des activistes politiques des deux extrêmes. Un jour, notre table de camping avec nos Bibles a été renversée. Pour certains, cette « Bonne Nouvelle » n’était pas si « nouvelle » que ça ni « bonne » pour eux ! J’étais meurtri par le malentendu : écoutant les cris de ma génération, j’avais une réponse, qui était pour moi, LA réponse : Jésus !
Et cette réponse était rejetée !

En classe de philo (9 heures par semaine !), la prof nous disait doctement : nous ne cherchons pas des réponses, mais des questions ! Elle, peut-être !
Mais un des élèves de ma classe s’est donné la mort par pendaison.
Pendant les cours, je dessinais… Lui aussi. Je le voyais dessiner le jeu du pendu, inlassablement. Hélas pour lui : la réponse, la nouvelle explication n’est pas parvenue jusqu’à lui et ses questionnements. De quoi hurler !

Bienvenue dans le monde du travail !

Après un échec scolaire, j’ai connu un automne au chômage. Aiguillé vers la SNCF par une petite annonce, j’ai pris un emploi de bureau. Vivant avec mes chers collègues, j’ai entendu pendant trois décennies leurs préoccupations, gardant cette envie de vivre l’Évangile et de le partager.
C’est pour eux que j’avais écrit mes romans (ils l’ont bien compris !)
J’y mettais leurs doutes également, sans vouloir apporter quelque chose de ficelé. Démarche atypique que je ne suis pas sûr d’avoir réussie.
Je me suis arrêté en chemin, découragé. L’échec et le doute font aussi partie de ma vie, car je prends le risque de me planter. Mais le désir reste chevillé en moi : je voudrais, par mon art, essayer, rater parfois, puis essayer encore de murmurer à mes amis artistes agnostiques ou athées ce que j’aimerais crier sur les toits : Christ est la réponse !

Art… de vivre !

Avec ma chère épouse Martine, nous avons fondé un foyer, avec trois enfants : Lydie, David, qui est décédé après deux mois de vie et Estelle.
Nous avons planté nos racines et « fleuri » dans une Église évangélique d’Alsace, à Weislingen. Pour moi, l’Église locale est le terreau idéal pour croître en Christ. On n’a rien inventé de meilleur. C’est aussi le lieu où l’artiste trouve son (difficile) équilibre.

Ma motivation : comme j’ai côtoyé de près mes collègues, pendant des décennies, j’ai appris à connaître leur mentalité. Pour moi, l’art a été donné par le Créateur comme un moyen de partage. Pareil pour l’humour, qui est tellement dévoyé de nos jours : j’essaie de faire de « l’humour propre » dans mes dessins de presse[5]. J’ai un profond respect pour mes contemporains, et j’entends leurs cris dans leurs productions artistiques[6]. De cœur à cœur, j’arrive à rester contemporain !

Les temps ont changé

Bob Dylan chantait en 1964 son tube : les temps changent ! Oui, près de vingt ans après la fin de la 2e guerre mondiale et en pleine guerre du Vietnam, l’époque était au changement. Suis-je nostalgique de ces temps, avec mes amis babas cool aux cheveux blancs ?

Pas plus que ça ! « Les choses ont changé », autre chanson du même Dylan, des années plus tard. Bon, j’ai du mal avec l’évolution technologique qui me permettrait de fabriquer des amis par voie électronique. Je résiste encore à un certain formatage mondial par le net. Mais je vibre avec la nouvelle chanson dans ce qu’elle a de sincère. Je garde en moi cette rage de communiquer l’incommunicable, l’indicible évangile, qui n’est pas du passé, qui est très contemporain et a même tout l’avenir devant soi.
Oui, les temps ont bien changé ! Et chacun de nous peut encore changer aujourd’hui !

-… Déjà fini ? Mais tu n’as pas encore commencé !

Si vous insistez… Je suis né en 1953. C’est l’année où mes parents ont trouvé la foi. Ils étaient protestants, sans jamais avoir entendu parler de nouvelle naissance (!) Pourtant cette expérience n’est pas facultative, loin de là.
Ce n’est pas non plus une invention de chrétiens étrangers « born again » ! Ni du jargon évangélique ! Jésus dit lui-même que si une personne ne naît pas de nouveau, elle ne peut pas entrer dans le royaume de Dieu ![7]

Lors d’une rencontre d’évangélisation sous un chapiteau, dans le petit bourg où ils étaient boulangers, ils se sont convertis à Jésus-Christ.
Voulant d’abord partager leur foi et leur joie dans leur milieu religieux, ils ont vu que ce message n’était pas trop le bienvenu. Plus tard, ils ont trouvé leur nourriture spirituelle dans des réunions informelles, chez des particuliers. J’ai baigné dans ce milieu, et à 7 ans et demi, j’ai « donné mon cœur à Jésus ». J’ai cheminé, expérimentant la grâce et le pardon de Dieu, sur la base du sacrifice de Jésus mon Sauveur et Seigneur, et m’identifiant avec la petite Église méprisée. À l’âge de douze ans et demi, j’ai eu consciemment l’assurance du salut, qui ne m’a plus quittée. Deux ans plus tard, j’ai demandé à être baptisé.

Martine

Je suis toujours émerveillé de voir comment se goupillent les différents itinéraires. Cela me bluffe de voir des vies transformées. Ainsi mon épouse. Jeune fille, elle accompagnait ses copines au bal du samedi soir.
Une chanson poussée par l’orchestre a été le déclencheur : « Nous irons tous au ciel[8] » ! Elle savait bien que non, hélas ! Cela l’a vaccinée de ce milieu. Elle est sortie de la salle, attristée ! Dans une autre salle, où le groupe de jeunes chantait toute autre chose, Martine s’est décidée pour Jésus, acceptant de payer le prix de cette décision : l’incompréhension de ses collègues et amis.

Une foi simple

Amoureux d’elle, je suis aussi impressionné par sa foi simple et authentique. Je peux lui montrer mes essais artistiques, car je sais qu’elle a une sensibilité très sûre, et son avis compte beaucoup pour moi.
D’abord, je proteste, un peu vexé, puis je dois admettre que (souvent !) elle a raison ! Elle voit simple là où je vois compliqué. Là où je me fais un film, elle me ramène doucement à la vraie vie !

Plus important : elle me voit vivre et je ne peux pas faire semblant. Parfois, dans mes propos, elle détecte une incohérence dans ma façon de vivre.
Par exemple, il m’arrive de garder de l’amertume envers quelqu’un, elle m’aide à venir à la lumière et à sortir de mes ruminations : en disant mes mauvaises pensées à Dieu et en lui demandant pardon. D’ailleurs, le pardon reçu et accordé est un puissant moteur de notre couple ! Nos différences de tempérament s’exacerbent parfois, et le plus souvent, elles se complètent !

Profil bas

Bien des gens seraient mieux disposés à suivre le Christ, si ses disciples au XXIe siècle lui ressemblaient davantage. Moi-même, je ne peux que faire profil bas : je ne suis pas toujours à la hauteur de ce que mes amis attendraient d’un chrétien. D’un autre côté, je remarque dans la vie d’autres chrétiens que leur foi n’est pas du blabla religieux.
Quand on frappe dessus, ça ne sonne pas creux !

Ainsi, quand je vois dans mes deux filles et leurs maris agir le même Dieu, mon cœur déborde de reconnaissance. Que des jeunes de l’ère numérique vibrent pour le Jésus des Évangiles m’interpelle profondément.
« Une nouvelle génération avec la toujours nouvelle explication. »
N’est-ce pas formidable ?!

Que mes filles aient dans leurs yeux la même petite flamme que celle de leur grand-mère[9], ce n’est pas affaire d’hérédité. C’est leur propre choix, auquel répond le miracle de la nouvelle naissance.
Et, vibrant avec elles, je brûle de vous accueillir dans cette grande famille mondiale des chrétiens !

Lavé de quoi ?

  1. Dans une chapelle, une chorale reprend ce gospel : « O happy day ! » Elle a répété comme un 33 tours rayé « When Jesus washed… » (quand Jésus m’a lavé) en oubliant la suite : « my sins away ! » (m’a lavé de mes péchés !) Oups ! Où est passé le péché ? On dirait que la notion de péché n’est plus religieusement correcte ! Moi, je sais de quoi je suis lavé ! Je n’ai pas eu besoin d’être lavé de mes problèmes, de ma timidité, de mes soucis, mais de mon péché ! Osons compléter la phrase amputée et répétons avec David, dans la Bible : « Heureux celui dont le péché est pardonné ![10]» C’est ce « happy day » que je souhaite à tous !

Francis SCHNEIDER

J’assume

C’est vrai, ce qu’on dit de moi, j’assume, j’assume,
Moi, ce costume me va, j’assume tout !
Je suis timide, tiens on ne le dirait pas !
Mais j’ai du mal à vous regarder dans le blanc des yeux,
Je suis timide, ça ne me dérange pas,
Je ne rougis pas de rougir, réchauffez-vous à mon feu !

Je suis un vieux[11], courbé sous le poids des années
Et mes cheveux hésitent entre le gris et le gris blanc,
Je suis un vieux, avec prothèse et dentier,
Je peux croquer l’instant présent de toutes mes belles dents !

J’ai un accent, pas grave, je le revendique,
On peut le couper au couteau, c’est bien plus savoureux !
J’ai un accent géographique et historique,
Je voudrais surtout faire entendre l’accent d’un homme heureux !

Je suis chrétien, et je voudrais que ça se voie,
Désolé, mais je n’ai pas appris à être discret,
Je suis chrétien, même quand ça ne le fait pas,
Je ne peux pas cacher ma joie (devrais-je m’en excuser ?!)

Je ne suis pas toujours celui que je voudrais,
Oubliez que j’ai l’air d’un brave donneur de leçons !
Je ne suis pas toujours fier de ce que j’ai fait
Alors devant Dieu et les hommes, je demande pardon !

Chanson de Francis Schneider (www.pacofrancis.com)

Il me faut une foi

Il me faut une foi bien à moi
Simplement une foi bien à moi,
Une foi qui soit à moi !

La foi de mon papa ne suffit pas !
Je ne l’ai pas trouvée au fond de mon berceau…
La foi de mon papa ne suffit pas !
Je voudrais une foi qui soit vraiment perso !

Non, toi, tu ne peux pas croire pour moi
C’est bien gentil, mais ça ne marche pas comme ça
Non, tu ne peux pas croire pour moi,
Si tu veux croire, vas-y mais seulement pour toi !

La foi, c’est important, ne crois-tu pas ?
Personne n’est sauvé par la foi du copain !
La foi, c’est important, ne crois-tu pas ?
Oui, ce qu’on croit doit être de première main !

Il te faut une foi bien à toi
Simplement une foi bien à toi,
Une foi qui soit à toi !

Non, moi, je ne peux pas croire pour toi !
Je voudrais bien, remarque, mais je ne peux pas !
Non, moi, je ne peux pas croire pour toi,
C’est à toi si tu veux de chanter avec moi :

Il me faut une foi bien à moi
Simplement une foi bien à moi,
Une foi qui soit à moi !

Chanson de Francis Schneider (www.pacofrancis.com)

[1] … au cinéma de Bouxwiller… Claude Siefert en parle dans son témoignage !

[2] (sans comprendre toutes les paroles, loin de là)

[3] écrite en fait par… Michel Berger ! (Je l’ai appris bien plus tard)

[4] Mais ça se vendait !

[5] (sous pseudo : paco).

[6] quand elles sont sincères et à peu près libres du pouvoir de l’argent…

[7] Évangile de Jean, chapitre 3

[8] Non, ce n’est pas la chanson de Polnareff !

[9] Je vous invite à lire son témoignage dans « Ils ont choisi de vivre », 1er volume.

[10] Psaume 32

[11] « Tu te projettes dans vingt ans ?! »  (Remarque de Claude en 2016)

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