Éphésiens 2.1, 5 : On ne lance pas une corde à un mort ?

Un homme est embourbé au fond d’un puits profond. Son seul salut réside dans les bras forts qui lui lancent une corde et le hissent en-dehors du puits…
Qui ne connaît cette analogie pour le pécheur déchu ?
Mais Éphésiens 2 l’invaliderait-il  ?

C’est en tous cas ce que laisse  entendre régulièrement la pensée calviniste, telle qu’on la trouve par exemple exprimée dans les deux citations suivantes, avec l’image similaire de l’homme en train de se noyer :

Le cadavre d’une personne noyée ne saisira pas une bouée de sauvetage, et un cadavre n’ouvrira plus la bouche pour avaler un médicament censé le sauver.  (R.C SPROUL, Choisis par Dieu, p 98ss)

Nous n’étions pas juste en train de nous noyer, nous n’avions pas besoin qu’on nous jette une bouée de sauvetage, mais nous étions totalement morts au fond de l’océan. Il nous a tirés de l’eau, nous a insufflé une vie nouvelle et nous a mis sur pied. À présent, chaque inspiration que nous prenons, nous la devons à sa délivrance pleine et entière de toute notre impuissance et de notre mort.  (Dane ORTLAND, De gloire en gloire, p 28)

Qu’en penser ? Je vous propose une réponse en deux temps…

Oui, c’est vrai, aucun homme n’est capable de se sauver ou de contribuer à son salut !

Effectivement, nous n’étions pas simplement en danger de mourir spirituellement, mais nous étions bien morts dans nos péchés, et ce passage des Écritures l’atteste bien :

Éphésiens 2.1 : Autrefois, vous étiez morts à cause de vos fautes et de vos péchés.
v5 : alors que nous étions spirituellement morts à cause de nos fautes, il nous a fait revivre les uns et les autres avec le Christ. 

Contrairement à ce que R.C SPROUL présume de la part des non-réformés, nous sommes d’accord avec lui que l’homme déchu est mort par ses péchés face à Dieu, pas seulement malade, et que les hommes morts ne peuvent se rendre vivants, ils ne peuvent créer la vie spirituelle en eux.

Oui, c’est Dieu qui nous rend vivants ; c’est Dieu qui nous vivifie en nous sortant de la mort spirituelle.

C’est un beau point d’accord avec les deux auteurs cités ! Détaillons :
– Comme eux, et comme mon ami Arsène qui parlait de ce puits ce dimanche lors de notre culte dominical, nous ne voyons pas dans l’océan du naufrage (ou dans le puits de la chute) la perdition éternelle dans laquelle nous nous trouvions.
Nous ferions  un raccourci dangereux, plus religieux que biblique, du genre :
« J’avais un gros problème, j’étais perdu à cause de mon péché, Jésus a pris ma condamnation sur lui, il m’a sauvé de l’enfer, ouf, merci Jésus ! »
>> Et je continue à vivre dans le péché comme avant ??

Mais l’océan dévastateur ou le puits boueux dans lequel je suis tombé est celui de mon péché, de ma rupture avec Dieu !

Alors, notre optique change  : « J’avais un gros problème, mon péché m’a séparé de Dieu et m’a enveloppé de sa fange sans que je sois capable de m’en dégager. Jésus, en mourant pour moi, ne m’a pas seulement évité le châtiment pour mon péché, mais il a vaincu mon péché. »

Christ ne m’arrache pas seulement à la condamnation pour mes péchés, mais à leur emprise hideuse, pour pouvoir marcher en nouveauté de vie !

– Comme les trois frères cités, nous rejetons donc la possibilité pour les morts spirituels que nous étions de « rejoindre le rivage à la nage, même avec une bouée » ou de « sortir du puits en escaladant ses parois ou même le long de la corde » !
D’ailleurs, comme la photo le montre, on pourrait même dire que Jésus ne lance pas la corde, mais qu’il descend lui-même jusque dans la misère de notre péché pour nous « encorder » ! Mais nous constaterons tout à la fin de l’article que les deux images véhiculent exactement la même vérité, n’anticipons pas !

2023-01-31

Je vous avais promis un deuxième temps, le voici :

Non, nulle part les Écritures n’accréditent l’idée de cadavres inertes au fond de l’eau ou dans la boue !

Notons d’abord qu’en Ézéchiel 37.4, Dieu lui-même s’adresse à des « ossements desséchés » spirituels, et leur demande…  d’écouter la parole de l’Éternel !
Et il annonce à ces os, aux versets
5 et 6 :  

Voici ce que dit le Seigneur, l’Éternel, à… ces os : 
Je vais faire entrer un esprit en vous et vous vivrez. 6 Je vous donnerai des nerfs, je ferai pousser sur vous de la chair, je vous recouvrirai de peau, je mettrai un esprit en vous et vous vivrez. Vous reconnaîtrez alors que je suis l’Éternel. 

Constatons que dès après la chute, Dieu a parlé au « mort » Caïn et lui a dit :

Pourquoi es-tu irrité, et pourquoi ton visage est-il abattu ? Certainement, si tu agis bien, tu relèveras ton visage, et si tu agis mal, le péché se couche à la porte, et ses désirs se portent vers toi : mais toi, domine sur lui. Genèse 4.6, 7

  • Dieu se préoccupe du bien-être de Caïn !
  • Il lui demande de dominer sur sa tentation ! Cela devait donc être possible ?
  • Il parle à Caïn comme à quelqu’un qui sait très bien que son projet meurtrier est mauvais.
  • Quand Dieu parle à un mort spirituel, il agit dans son cœur, donne qu’il puisse l’entendre, et l’invite à lui obéir !!

Si la chute a coupé la relation de l’homme avec Dieu, et a fait de lui un être « mort » pour lui, elle n’a pas détruit son statut de créature faite à l’image de Dieu.

Remarquons aussi que dans le contexte immédiat de notre texte même, l’apôtre décrit l’homme pécheur d’une manière qui ne laisse aucune place à l’image d’un cadavre inerte :
– au verset 2, nous obéissions à Satan et refusions d’obéir à Dieu,
– au verset 3, nous étions dirigés par nos instincts, nos passions etc.
Ce qui nous a valu la colère de Dieu, qu’on voit mal se déclencher contre un cadavre inerte !

Il nous faut résolument abandonner cette conception de la mort spirituelle, trop calquée sur la mort physique… du seul corps !

En réalité, l’homme « mort » a toujours les capacités décisionnelles pour saisir la corde du salut (l’intelligence, le cœur, la volonté ). Il a toujours la faculté de réfléchir et d’évaluer ses actes et ceux des autres, car la conscience que Dieu a mise en lui est et reste sa boussole divine, qui lui dit ce qui est juste et ce qui est mal. Même si le péché tend à étouffer sa voix, elle ne peut pas être désactivée complètement, aussi peu que notre aspiration à ce qui est beau et vrai, plutôt que laid et faux, et que la conscience de l’éternité, inscrite dans notre cœur.
Tous ces éléments sont d’origine et de nature divines, donc permanents !

Le problème est ailleurs ! Ces potentiels ont été gravement éclipsés dans le cœur de l’homme pécheur, non par son inertie de cadavre, mais par sa rébellion très active qui fait que ce n’est plus Dieu qui gouverne ses pensées, mais le Moi, téléguidé par le Prince du mensonge, comme vu plus haut !

Ce n’est pas la conscience du pécheur qui est en panne, c’est sa chair qui usurpe la place de la conscience et refuse d’écouter Dieu ! Pourtant, Dieu continue à s’adresser inlassablement à lui :

Michée 6.8, 9 On t’a fait connaître, ô homme, ce qui est bien.
Et ce que l’Éternel demande de toi, c’est que tu pratiques la justice, que tu aimes la miséricorde, et que tu marches humblement avec ton Dieu.
La voix de l’Éternel crie à la ville, et celui qui est sage craindra ton nom. Entendez la verge et celui qui l’envoie ! 

Un tel texte, comme de nombreux autres, s’adresse bien à des morts spirituels, n’est-ce pas ? Mais n’oublions pas que celui qui parle est le Vivant aux siècles des siècles, et que sa Parole est porteuse de vie pour quiconque l’écoute, et cela déjà bien avant la nouvelle naissance ! (pendant la « gestation » ?)

En conclusion

Notre état de pécheur était plus désespéré que nous ne le pensions !

Malgré les potentiels réels évoqués, en considérant nos propres efforts pour venir à Dieu, notre état de pécheur loin de Dieu était vraiment sans issue.

De nous-même, jamais nous ne serions venu(e) à Dieu comme un pécheur repentant, nous ne le désirions pas, nous nous opposions viscéralement  à la volonté de Dieu pour notre vie ! De plus, nous avions asservi notre volonté à Satan, qui nous maintenait fermement captifs dans notre puits !

De nous-même, au fond du puits de notre péché, jamais nous n’aurions  crié vers Dieu pour qu’il nous en retire, car nous nous plaisions dans notre péché !
ET si nous criions, c’était notre révolte que nous faisions monter vers Dieu !

De nous-même, nous n’avions pas non plus la moindre conscience
– du prix de notre salut, la mort de notre Sauveur à notre place, (substitution)
– de l’objectif de ce sacrifice : non pas sauver des individus de l’enfer, mais former un peuple qui lui appartienne :

Tite 2.14 : Notre Sauveur Jésus-Christ s‘est donné lui-même pour nous, afin de nous racheter de toute iniquité, et de se faire un peuple qui lui appartienne, purifié par lui et zélé pour les bonnes œuvres.

Nous avions vraiment besoin d’une initiative puissante de Dieu lui-même ! Et la bonne nouvelle de l’Evangile nous permet de ne pas terminer sur ce constat d’échec, car Dieu a réellement pris cette initiative :

La grâce de Dieu est plus extraordinaire que nous ne le pensions !

Ainsi, en considérant
– la préservation de la conscience dans l’homme déchu que nous étions,
– l’action de la Parole de Dieu qui  nous a appelé(e) clairement à lui obéir,  

–  et, au travers d’elle, l’action vivifiante de l’Esprit de Dieu en notre cœur,
qui nous a montré l’état de notre cœur, qui nous a révélé Christ crucifié pour nous, et qui a suscite en nous la repentance et la foi,

nous pouvons dire que nous étions quand-même  loin du cadavre inerte au fond du puits ! (Certains appellent cette action puissante (mais résistible) de Dieu dans le cœur des pécheurs la grâce prévenante.)

Et, simplement parce que nous n’avons pas résisté à cette action de Dieu seul,  c’est cette même grâce, cette même Parole, ce même Esprit, qui nous a régénérés pour faire de nous un enfant de Dieu !
Il n’y a donc vraiment aucun mérite pour nous !

Courage donc, partageons l’Évangile aux morts spirituels qui nous entourent !
Au moment opportun, Dieu parlera avec puissance et efficacité à chacun d’eux, à moins que leur endurcissement ne rende cet appel inefficace pour eux !

2 Thessaloniciens 2.10 : Il usera de toutes les formes du mal pour tromper ceux qui se perdent, parce qu’ils sont restés fermés à l’amour de la vérité qui les aurait sauvés. 

Au moment où je finalise cet article, par une de ces merveilleuses coïncidences du Seigneur souverain, le verset du jour de mon appli de lecture biblique YouVersion est celui-ci :

2023-02-01

Waouh ! Notre puits !! Avec deux confirmations :

– Il y a bien une voix qui monte du fonds du puits !
– C’est en l’entendant que le Seigneur nous en fait remonter !

C’est pour cela que, comme déjà suggéré, que l’on parle d’une corde lancée au désespéré ou que l’on envoie le sauveteur dans le puits, c’est la même chose :
– dans les deux cas, le sauvetage dépend entièrement du sauveteur qui hisse l’homme hors du puits, soit après lui avoir lancé la corde, soit après être allé l’encorder,
– dans les deux cas, l’homme fait les deux seules choses qu’il puisse accomplir dans son état désespéré :
crier à l’aide de toutes ses tripes, (poussé à cela par le Saint-Esprit, pour la réalité spirituelle qui correspond à cette analogie),
– et se laisser sauver par le moyen choisi par le sauveteur !
N’est-ce pas merveilleux ? Ainsi, ce cri de désespoir sur soi-même se trouve suivi par un cri de soulagement et de louange :

Ésaïe 38.17 : Voici, mes souffrances mêmes sont devenues mon salut;
Tu as pris plaisir à retirer mon âme de la fosse du néant,
Car tu as jeté derrière toi tous mes péchés.

Claude

Compléments 

Des marques indélébiles de Dieu dans l’homme déchu (Jean-Louis DENEUFCHÂTEL)

Le misérabilisme est-il vraiment biblique ?

La Bible enseigne-t-elle la totale corruption de l’homme ?

Y a-t-il un mérite à notre foi ? (John PIPER)
(Article d’Évangile 21)

Avez-vous lu ?

Deux livres du même auteur tellement bienfaisants pour une piété authentique :

2023-02-03

2023-02-03 (2)

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J’avoue que j’ai eu du mal à entrer dans « Doux et humble de cœur » jusqu’à ce que je comprenne que le problème était au niveau de mon propre cœur !
« De gloire en gloire » nous interroge sur la réalité de notre vie centrée sur Christ.

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3 réflexions sur « Éphésiens 2.1, 5 : On ne lance pas une corde à un mort ? »

  1. C’est là, Claude que la lecture trinitaire de la constitution de l’homme éclaire la question car nous étions morts quant à nos esprits, le reste était bien vivant (mais surtout pour faire le mal) et le Seigneur, après nous avoir régénérés en esprit (Son Esprit venant s’unir à notre esprit), doit nous redresser dans toutes nos facultés pour qu’elles soient à Son service. Par ailleurs je suis bien d’accord avec toi que la façon dont nos frères calvinistes dépeignent la « dépravation totale » de l’homme reste très floue et approximative face à ce qu’en dit la Parole de Dieu. Ils confondent les facultés de l’homme, qui, sauf l’esprit qui est « mort », restent là et ont été créées par le Seigneur, avec nos choix moraux et spirituels (la chair) qui vont la plupart du temps contre la volonté de Dieu.

    1. J’avoue que ton éclairage tripartite pourrait tenir la route, dans la mesure où il mettrait des mots sur ce qui est mort dans le pécheur et ce qui ne l’est pas. La Parole nous permet-elle de le faire ? J’en suis moins sûr ! Mais ton option reste recevable en concédant que la Bible ne nous donne pas un cours d’anatomie spirituelle clair et incontestable. Et en constatant que les deux hypothèses arrivent au même résultat de montrer, clairement cette fois, que le Seigneur vient sauver des pécheurs « morts » dans leurs péchés qui ont entendu son appel et ont crié à lui !

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